⁠⁠Les clips : reflet d’une culture et créateurs de souvenirs

Si on te dit Dilemma, quel est le premier visuel qui te vienne à l’esprit pour évoquer ce son ? Sans doute, l’image de Kelly Rowland et Nelly assis sur le capot d’une voiture en train de lover ensemble, ou peut-être celle où Kelly chante en pensant à son célèbre dilemme émotionnel en regardant par la fenêtre. Ces scènes emblématiques ainsi que leurs tenues, coupes sont gravées à jamais dans notre mémoire. Mais Dilemma aurait-il eu le même impact sans ce clip ?  

 

Un clip est une forme de production visuelle courte qui accompagne une musique, créant un espace de représentation où sont explorés des thèmes culturels, identitaires et esthétiques. Il devient un moyen d’expression à la fois artistique et commercial, reflétant, renforçant ou contestant des normes sociales et des imaginaires collectifs. Nous avons eu l’opportunité d’échanger avec Karl EPEE NSONGO, créateur de HYA 2.0, pour discuter de l’importance des clips musicaux. HYA 2.0 est une application qui permet aux utilisateurs de lier leurs souvenirs musicaux et leurs ressentis directement à côté aux morceaux qui ont marqué leur vie.

L’essor des clips : de la BBC à l’explosion MTV

Dans les années 1960, la BBC lance l’émission Top of the Pops, un programme où les artistes se produisent en direct. Face au succès grandissant, la chaîne a rapidement adopté des vidéos pré-filmées, permettant de diffuser des versions plus courtes des morceaux tout en élargissant leur portée. Cette approche a marqué les débuts du clip comme un outil marketing essentiel. Pour des groupes comme Queen, le clip de Bohemian Rhapsody, par exemple, initialement une prestation live enregistrée, a marqué un tournant dans l’industrie musicale.

 

L’histoire du clip prend un virage décisif le 1 août 1981 avec le lancement de MTV (Music Television). La chaîne diffuse Video Killed the Radio Star de The Buggles, qui sera le premier clip diffusé sur leur chaîne. Le choix de ce titre qui n’est pas anodin, « La vidéo a tué la star de la radio » symbolise une révolution dans l’industrie musicale, qui passe de la simple écoute à une expérience audiovisuelle complète. L’engouement croissant pour les clips incite les artistes et leurs labels à investir des milliers, parfois des millions, pour produire des clips de plus en plus impressionnants.

“Le clip au moment où il sort c’est du contenu en plus que les auditeurs ont. Quand on découvre un son aujourd’hui sur les plateformes d’écoute, il y a une découverte sonore riche, mais le clip rajoute une expérience visuelle que l’on n’a pas avec l’expérience auditive.”

 

L’exemple le plus emblématique reste le clip de Thriller de Michael Jackson en 1982, avec un budget exorbitant pour l’époque de 800 000 dollars et une durée de 14 minutes. Jamais auparavant un clip n’avait atteint cette ampleur, posant ainsi les bases d’une nouvelle ère dans l’industrie.“Dans bon nombre de ses clips, Michael Jackson joue sur ces mises en abyme savantes et modifie constamment et subtilement, en déplaçant et en changeant le contexte, le cadre et le sens même de ce qui est perçu : rêve, réalité, souvenir, ces différents modes de la perception s’interpénètrent, se contredisent et s’annulent mutuellement. Thriller est ainsi constitué d’un multiple emboîtement des cadres narratifs qui participe, souvent à l’insu du spectateur, à son efficacité. C’est la première fois dans son œuvre que Michael Jackson met en scène une telle métamorphose négative, dans laquelle sont exposées des angoisses de type psychotique telles que la défiguration, le morcellement, la dévoration.”- SCHAUDER, Silke. Le clip « Thriller » de Michael Jackson : une métamorphose négative du héros à l’adolescence ? Adolescence, 2013/4 T. 31 n°4, p.965-977.

Une révolution culturelle et visuelle

 

Les clips des artistes afro-américains étaient longtemps marginalisés, souvent diffusés tard le soir ou tôt le matin, donc lorsque l’audience était la plus faible. Pour rappeler le contexte historique, nous sommes en 1980, seulement 14 ans après l’adoption des Civil Rights Act ( 1964) , qui garantit les droits civiques pour les afro-américains après une politique de ségrégation mise en place pendant plus de 80 ans. Cependant, l’avènement du hip-hop et du rap dans les années 70 a bouleversé leurs sorts. Ces genres ont apporté de nouvelles dynamiques visuelles.

 

“ La mode et les clips vont de paire notamment dans le hip-pop

 

Les clips de Rap deviennent des vitrines de luxe, de grosses voitures et de manoirs somptueux, avec des « vixens », ces femmes séduisantes qui incarnent l’esthétique luxueuse des clips. Elles sont très populaires dans les années 1990-2000. Le clip devient alors un moyen puissant d’exprimer une identité, de proposer un lifestyle qui fascine, et de se connecter aux fans sur un tout autre niveau. Un autre décor sera mis en avant, notamment avec des artistes comme Queen Latifah, montrent la réalité des ghettos ainsi que la présentation de leur précarité, leurs difficultés au quotidien et leurs réalités. Pour de nombreuses marques, le clip devient également une plateforme de visibilité stratégique : des marques comme Adidas, avec Run–DMC, ou Nike, avec Nelly, y trouvent un moyen efficace de promouvoir leur image et d’associer leurs produits à la culture musicale.

Le clip : identité et mémoire

 

Les clips ont contribué à la culture pop et hip-hop, permettant aux artistes de construire leur identité et d’incarner visuellement leurs chansons. Plus qu’un simple moyen de promotion, les clips sont un espace pour diffuser une histoire, un persona unique, et créer une proximité avec les fans. On crée un storytelling que l’on suit durant quelques minutes, en général à la fin d’un clip, la situation n’est soit pas dénouée ou elle est livrée à une libre interprétation.

 

 

Le clip, c’est l’outil pour exprimer son identité, justement pour marquer une era […], sur les plateformes le storytelling est souvent limité et le clip est là pour imager une chanson”

 

Aujourd’hui, la place des clips évolue et elles ont un nouveau terrain de jeu avec l’omniprésence des réseaux sociaux, les NTIC ainsi que les applications de streaming. Les artistes partagent régulièrement des moments de leur vie, parfois banals, sur Instagram ou TikTok, réduisant l’effet de rareté de leurs apparences publiques. Ce qui expliquerait que le clip soit aujourd’hui moins valorisé. Dans les années 90-2000, un clip représentait l’un des moyens pour les fans de voir leur artiste en action, de le découvrir dans une mise en scène réfléchie et travaillée.

 

 

“ Ce que j’aime beaucoup sur YouTube, ce sont les commentaires. C’est là où tu vois que les spectateurs sont hyper passionnés, car ils décryptent ce qu’ils voient, ce qui se passe dans le clip. C’est ce qui est intéressant avec les clips parce qu’on ouvre un espace de dialogue pour se positionner dans l’era d’un artiste.

 

 

Lorsque les premières notes de la musique démarrent dans un vidéoclip, on peut utiliser différentes techniques pour synchroniser les images avec le rythme musical. Aujourd’hui, les performances des artistes ne suivent pas toujours le tempo précis de la musique. On peut ajouter des dialogues, qu’ils soient en lien ou non avec la chanson. Souvent, à la fin, le récit peut se terminer sans musique. Contrairement au passé, où les vidéoclips avaient tendance à briser la narration, on voit maintenant de nouveaux types de vidéoclips plus variés. Cela est en grande partie dû aux nouvelles plateformes, qui changent les habitudes de visionnages, loin des formats rigides de la télévision.

 

 

Ce qu’on a perdu entre la transition des chaînes de musique comme MTV vers YouTube, c’est le contenu structuré et l’intention de découverte. Quand tu allais sur MTV, tu savais ce que tu allais y trouver. Sur YouTube, en revanche, tu pars à la recherche de quelque chose, mais tu te retrouves souvent à découvrir des clips par hasard, guidés par les recommandations. Ça te permet de passer des heures, voire des nuits entières, à explorer. TikTok, en comparaison, reste trop écarté, même s’il essaie de se créer un espace pour les artistes. Il n’y a pas de véritable expérience de visionnage dédiée.

 

Malgré tout, la symbolique des clips persiste dans la mémoire collective. Un simple morceau peut invoquer une scène : si on dit Hey Ya! de OutKast, peut-être imaginez-vous André 3000 dans son costume vert flashy. Ou si nous chantions en chœur, If I Were a Boy de Beyoncé, des fragments en noir et blanc de son clip vous viendraient sûrement en tête.

 

 

“ En terme de souvenir, on a beaucoup plus tendance à connecter avec les gens (…) La puissance du clip c’est d’ancré quelque chose de non palpaple dans le matériel, le concret 

 

Ces clips ont laissé une empreinte visuelle et émotionnelle, des petits souvenirs qui demeurent indissociables de la musique qu’ils accompagnent.

 

HYA 2.0, ou « Hello You Artist », est une application innovante qui révolutionne la manière dont nous partageons et vivons nos souvenirs musicaux. Dans un monde où la musique occupe une place centrale, HYA 2.0 permet aux utilisateurs de créer une archive musicale personnelle, en associant chaque morceau à une émotion, un souvenir ou un moment précis. Cette plateforme encourage une immersion totale dans l’univers musical, où la découverte et le partage sont au cœur de l’expérience.

 

Le principal objectif de HYA 2.0 est de permettre aux utilisateurs de lier de manière plus profonde leur vie émotionnelle à leurs morceaux préférés. Chaque chanson peut être liée à une expérience personnelle, qu’il s’agisse d’un concert mémorable, d’un moment intime ou d’une époque de la vie particulière. L’application permet ainsi de créer un espace où la musique devient un véritable témoin du quotidien.

Une des forces de HYA 2.0 réside dans son approche participative. Les utilisateurs peuvent non seulement archiver leurs propres souvenirs musicaux, mais aussi découvrir ceux des autres. La plateforme encourage le partage de playlists, d’anecdotes et d’émotions, tout en permettant à chacun de soutenir ses artistes favoris. Cela transforme l’application en un lieu d’échange, où l’on se connecte à travers la musique.

 

Pour donner vie à cette vision, le projet HYA 2.0 cherche à grandir à travers une campagne de financement participatif. l’équipe espère améliorer les fonctionnalités de l’application et agrandir son équipe. L’objectif est de rendre cette plateforme accessible à un plus grand nombre d’utilisateurs et d’élargir son impact à l’échelle mondiale. HYA 2.0 représente bien plus qu’une simple application musicale. C’est un véritable outil de partage et de mémoire, un espace où la musique ne se contente pas d’être écoutée, mais devient un vecteur d’émotions et de connexions humaines.

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